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Ancien français et moyen français
Il ne faut pas considérer le français médiéval comme
une langue unitaire: chaque région parle son
dialecte
qui est aussi utilisé pour écrire. Ces variantes sont re-
groupées en deux grandes familles que l’on désigne par
leur façon de dire
oui
: la
langue d’
oc
(du lat.
hoc
) au
sud de la Loire et la
langue d’
oïl
(du lat.
hoc
ille
) au
Nord. L’importance de Paris dans l’histoire française va
entraîner l’imposition du
francien
, le dialecte de la capi-
tale, au reste du pays.
On sépare traditionnellement le français médiéval en
deux périodes, celle de l’ancien français (XI
e
-XIII
e
siècle) et celle du moyen français (XIV
e
-XV
e
siècle).
L’ancien français est très différent du français mo -
derne
. Les noms et les adjectifs sont déclinés comme
en latin. L’ordre des mots dans la phrase est libre et ne
correspond pas aux habitudes actuelles. Les verbes pré-
sentent de nombreuses irrégularités. Le sujet n’est pas
obligatoirement exprimé parce que les désinences sont prononcées et que cela
suffit (comme en italien) à distinguer les personnes verbales. L’orthographe est
phonétique (on écrit ce que l’on prononce), n’est soumise à aucune règle et peut
varier d’un écrivain à l’autre. Voici, à titre d’exemple, le début de la laisse CLXXIV
de la
Chanson de Roland
(la traduction est à la p. 26):
Ço sent Rollant que la mort le tresprent,
Devers la teste sur le quer li descent.
Desuz un pin i est alet curant,
Sur l’erbe verte s’i est culchet adenz
[…]
Pendant la période du
moyen français
, la déclinaison des noms et des adjectifs
disparaît. Par conséquent, l’ordre des mots dans la phrase devient plus rigide et
la séquence sujet-verbe-complément s’impose. Sous la main des juristes et des sa-
vants, l’
orthographe
se transforme et, de phonétique, elle devient
étymologique
:
on ajoute des lettres – non prononcées – qui rapprochent le mot français de son
origine latine.
Doi
devient ainsi
doigt
(lat.
digitum
) et
devoir
se transforme en
deb-
voir
(lat.
debere
).
L’édition des textes médiévaux
Lorsque nous lisons une œuvre du Moyen Âge, ce que
nous avons sous les yeux n’est pas le texte original,
mais une forme reconstruite grâce au travail d’un édi-
teur. En effet, la
diffusion orale des
textes a favorisé la
prolifération de nombreuses variantes (c’est le cas de
Tristan et Iseut
, par exemple – p. 33). En outre, la co-
pie manuelle implique que des
erreurs
se glissent
dans
les manuscrits
.
Au Moyen Âge, la notion même de texte est différente
de la nôtre: les copistes ne se soucient point de respecter
l’intégralité de l’œuvre; ils varient, ils ajoutent, ils sup-
priment des épisodes entiers.
Tout cela rend l’édition d’un texte médiéval une tâche
extrêmement délicate, car il faut
comparer
les manus-
crits (parfois très abîmés et lacunaires), corriger les
fautes, choisir entre différentes versions d’un épisode,
d’une phrase, parfois d’un seul mot.
Langues non romanes
Zone d’interférences entre oc et oïl
anglo-
normand
normand
manceau
gallo
breton
champenois
picard
lorrain-
roman
angevin
poitevin
alsacien
saintongeais
limousin
savoyard
provençal
alpin
provençal
maritime
languedocien
guyennais
gascon
béarnais
basque
LANGUE D’OC
PROVENÇAL
LANGUE D’OÏL
tourangeau bourguignon
berrichon
bourbonnais
franc-
niçard
germanique
FRANCO –
corse
catalan
comtois
f
r
a
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