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sont pour la plupart des religieux et l’Église
est généralement à l’origine de la
création
artistique
et littéraire. En pratique, au
Moyen Âge l’Église domine la vie en so-
ciété. Le christianisme imprègne le quoti-
dien sous toutes ses formes; aucune couche
sociale n’y échappe. Les rythmes du travail
et de la vie familiale sont scandés par les
cérémonies religieuses et toutes les actions
humaines sont liées à la vie sacrée.
F
Féodalité
Une déclaration de l’évêque Gérard de
Cambrai (début du XI
e
siècle) permet de
mieux comprendre la structure de la so-
ciété médiévale: «Dès ses origines, le genre
humain a été divisé en trois: ceux-ci prient,
ceux-là combattent, les derniers labourent
et tous s’aident les uns les autres.»
Cette organisation sociale s’impose définiti-
vement à partir du déclin de l’empire caro-
lingien. Les
oratores
, les
bellatores
et les
la-
boratores
forment alors une pyramide. À la
base, il y a les
paysans
: ils ne sont pas libres
mais entièrement soumis au propriétaire de
la terre qu’ils cultivent. On remonte ensuite
aux
barons, comtes et ducs
: ils possèdent
les terres et consacrent souvent leur vie à la
guerre. Au sommet, le
roi
, dont l’autorité
n’est que nominale, car l’Église exerce sur
tous les autres un pouvoir presque absolu.
Le fondement de ce système social est la no-
tion de service et de bénéfice. Un lien per-
sonnel unit en effet le
suzerain
à son
vassal
.
Ce dernier se place sous la protection d’un
seigneur qui lui accorde un
bénéfice
, en gé-
néral il s’agit d’une partie de ses terres (le
fief
, d’où le mot féodal) en échange de sa
fidélité
et de son soutien. Le suzerain est
lui-même vassal d’un seigneur plus puissant
et ainsi de suite jusqu’au roi de France, au-
quel tous prêtent serment.
À partir du XIII
e
siècle, l’équilibre se rompt
à cause de l’essor de la bourgeoisie. Les ar-
tisans se réunissent en confréries de plus en
plus puissantes. Les bourgeois obtiennent
pour leurs villes des privilèges juridiques et
économiques qui finiront par concurrencer
le pouvoir des seigneurs.
Fin’amor
«Tout le bien que font les êtres vivants
est fait par l’amour des femmes.» C’est
ce qu’affirme le
Traité de l’amour
(1185)
d’André le Chapelain.
Pour mériter l’amour d’une femme, tout
homme doit s’en tenir à des
normes de
comportement
rigoureuses. Il doit se mon-
ter
généreux
,
révérer son seigneur
,
ne ja-
mais blasphémer Dieu
ni les saints, être
humble
envers tous et servir qui que ce soit,
ne pas dire du mal d’autrui,
ne pas men-
tir
, ne se moquer de personne et
éviter les
querelles
. Il lui faut aussi être
courageux
,
hardi, ingénieux. Il ne doit pas être l’amant
de plusieurs femmes, mais le serviteur dé-
voué d’une seule. Il doit s’habiller d’une fa-
çon raisonnable, être sage, aimable et doux
envers tout le monde.
Cet ensemble de règles alimente les valeurs
de la
société courtoise
, chantée par les trou-
badours et les trouvères [ p. 29], mais aussi
le code du héros de la littérature chevale-
resque [ p. 30]. En effet, l’amour courtois,
ou
fin’amor
en langue d’oc, est le sentiment
de l’amant-poète pour la dame qu’il vénère.
La supériorité de la dame est la consé-
quence à la fois d’un fait social, puisqu’il
s’agit de la
châtelaine
, et d’un fait moral,
puisqu’elle est censée détenir
toute perfec-
tion
. L’amour courtois est chaste; le plaisir
d’amour est irréalisable par principe, car
il annulerait le
désir
et, par conséquent, le
processus courtois d’affinement qui en est la
base. Le plaisir sexuel est donc
fals’amor
,
tandis que seul l’amour fondé sur la passion
inassouvie est
fin’amor
.
J
Jongleurs
Les jongleurs étaient, au sens strict, des
acrobates, des saltimbanques qui s’exhi-
baient dans les châteaux, dans les cam-
pagnes et sur les places des villes. Issus gé-
néralement des bas-fonds de la société,
ils
entraient en contact avec toutes les classes
sociales
: les paysans et les marchands, mais
aussi les chevaliers et les seigneurs.
842
Serments de Strasbourg
v. 1100
Guillaume IX d’Aquitaine,
Chant de joie
v. 1090
Chanson de Roland
1160-90
Marie de France,
Lai du chèvrefeuille
v. 1170
Tristan et Iseut
v. 1181
Chrétien de Troyes,
Perceval ou le Conte du Graal
1201-53
Thibaud IV le Chansonnier
1405
Christine de Pisan,
Livre de la Cité des Dames
1461
Villon, Testament
1464
Farce de maître Pathelin
1229-75
Roman de la Rose
XIV
e
siècle
Passion du Palatinus
1175-1330
Fabliaux
1175-1205
Roman de Renart
Littérature
française
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